Jeudi 31 octobre 1918

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Nous quittons Vinkt vers 5h du matin et nous nous rapprochons du front.

A 5h30 notre artillerie se déclanche et de toutes parts, nos pièces crachent leur torrent de ferraille et d’explosifs sur les lignes ennemies. Quelques minutes plus tard, notre infanterie appuyée par un grand nombre de tanks bouleverse l’ennemi qui se replie bien vite. En quelques heures nous avançons de cinq kilomètres environ mais les réserves ennemies engagées dans la bataille nous arrêtent par une contre- attaque. Nous restons alors sur nos positions momentanément.

Puis le brancardage commence. Mon équipe (3ème) est à la disposition du poste de secours du 2ème bataillon pour l’évacuation des blessés. Nous apprenons qu’un de nos camarades est blessé très légèrement au cou.

Enfin, la Lys franchie et dépassée d’au moins sept à huit kilomètres nous permet de refouler l’ennemi vers l’Escaut.

Durant toute la journée nous transportons nos blessés et à la nuit, il n’en reste plus sur le terrain. Nous sommes dans la cave d’une ferme pour passer la nuit.

Le 69ème relève notre régiment cette nuit. Nous passerons alors en réserve.

Nous nous attendons à un repli de l’ennemi car nos positions à droite de notre secteur sont très avancées.

Mercredi 30 octobre

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J’ai bien eu raison de découcher car j’ai passé une bonne nuit pendant que ceux qui ont voulu rester à l’école se sont relevés à plusieurs reprises pour éviter les obus qui tombaient dans la région.  Au matin, temps superbe.

Activité d’artillerie de part et d’autre sur le front. Randonnées d’avions à chaque moment de la journée. Nous nous attendons à partir d’un moment à l’autre pour nous porter plus en avant avec le poste de secours central. Mon équipe (la 3ème) ira très probablement au poste de secours du 2ème bataillon comme sont parties deux équipes hier soir…. Nous attendons.

Pas de nouvelles au niveau diplomatique. L’Allemagne oserait-elle seule maintenant à vouloir continuer et tenir le coup ? Quelle prétention !!

Dans la soirée nous apprenons qu’une attaque de grande envergure aura lieu demain matin de la Hollande jusqu’à la Lorraine. Nous devons nous attendre à faire mouvement durant la nuit.

Deux bataillons du 26ème  (le 1er et 3ème) prennent les premières lignes cette nuit ; le 2ème reste en réserve. Enfin nous pouvons nous attendre à une dure journée demain.

Mardi 29 octobre

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Matinée de repos.

Ce soir un bataillon du 26ème (le 1er) doit prendre les lignes. Le second est en réserve et le 3ème restera dans les parages pour établir des travaux de défense. De là, j’en conclus que nous ne sommes pas pour prendre l’offensive ces jours-ci. Peut-être apprendrons nous encore de meilleures nouvelles très prochainement.

Nous devons donner concert au 3ème bataillon de 14h à 15h.

De 16h à 17h des obus viennent éclater dans notre voisinage c’est-à-dire au carrefour situé à une trentaine de mètres de notre cantonnement.

Nous quittons l’école en vitesse et à l’unisson, nous nous éloignons le plus possible de la zone battue par les « marmites ». Un obus trop court tombe sur un cantonnement du 3ème bataillon et  blesse un homme. Rien d’anormal à signaler ailleurs.

Nous rentrons manger la soupe et déjà on demande une équipe de musiciens en supplément des brancardiers au 1er et 3ème bataillon. La soirée continue à être très agitée. Alors, je décide avec mes camarades de quitter notre logement pour la nuit au cas où le tir recommencerait comme précédemment et pour éviter toute panique. Nous allons coucher à l’ancien poste de secours du 1er bataillon  libre pour l’instant et situé hors de la direction de tir.

Ce qui est à remarquer aussi, c’est que depuis que nous sommes ici, jamais les Boches n’ont bombardé le village. Commenceraient-ils à avoir maintenant des égards pour la population civile et à faire la guerre plus honnêtement que depuis quatre ans ?

Je crois qu’il est bien trop tard pour respecter les traités et les conventions de « La Haye ». Voudraient ils aussi que nous passions l’éponge sur leurs méfaits et leurs atrocités antérieures ? Au moment où arrive progressivement le « règlement des comptes », je pense qu’ils peuvent  s’attendre à des désillusions complètes !

Enfin leur artillerie est très active durant toute la nuit. On s’aperçoit même qu’ils en ont ramené.

Lundi 28 octobre 1918

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Beau temps.

Vers 10h15 bombardement intense de notre part sur notre droite. Nous pensons à l’attaque qui était prévue depuis quelques jours. Bien vite le régiment est alerté. Ordre de nous tenir prêts à partir de suite. Nous mangeons la soupe, attendons tout l’après-midi et les heures s’écoulent ainsi. Le calme revient peu à peu. Seules quelques pièces continuent leur tir de contre-batteries et contre-avion.

Nous avons tous le bonheur et la joie d’apprendre à l’instant, à 15h par radio  (T.S.F.) que l’Autriche Hongrie accepte intégralement toutes les propositions du Président Wilson : Les bases de l’armistice et de la paix.

Elle demande à négocier de suite les propositions de paix qui leur sont imposées sans s’occuper de l’Allemagne.

Un beau début. Les puissances centrales commencent à s’écrouler.

L’Allemagne reste maintenant seule et la Turquie isolée là-bas en orient sera obligée de capituler à son tour d’un moment à l’autre. Nous voyons dès maintenant la fin bien proche.

Dans la soirée les avions ennemis viennent survoler nos batteries d’artillerie et leur lâchent des bombes. Dans la nuit nous entendons au loin les éclatements sourds d’obus toxiques. Rien de plus à signaler.